Chronique Ovine du Sud :

L’agrivoltaïsme – multiplications des projets en élevage ovin

Cette chronique pourrait commencer comme une émission de France culture, avec le teaser qui dirait : « Personne ne sait ce qu’il se passe aujourd’hui car personne ne veut qu’il se passe quelque chose … ». C’est ainsi que des développeurs de centrales agrivoltaïques proposent des projets à des éleveurs… C’est ainsi qu’en PACA, chacun fait son petit bonhomme de chemin dans son coin, et que nous verrons des champs agricoles couverts à 40 % par des panneaux photovoltaïques, avec des brebis qui pâturent dessous… C’est ainsi, que nos paysages vont changer et que l’on fera le constat « qu’il se passe quelque chose »…

Il n’y a pas que sur les toits, les parkings et les anciennes décharges que le gouvernement incite à installer des panneaux photovoltaïques. Un des objectifs qui a été donné par la Programmation Pluri-annuelle de l’énergie (PPE) conduirait à une couverture de moins de 1% de nos surfaces agricoles française, d’ici 2050. Moins de 1%, pas tant finalement… Quoi que.

L’agrivoltaïsme, pourquoi et comment ?

En Mars 2023, a été promulguée la Loi sur l’accélération des Energies renouvelables. Celle-ci apporte une définition précise de l’agrivoltaïsme. Des précisions bienvenues, qui nécessitent cependant d’être reprécisées, et ce, via un décret d’application très attendu. Voilà ce qu’il en est à ce jour :

Les objectifs de la Programmation pluri-annuelle de l’énergie (PPE) visent à augmenter significativement, d’ici 2050, la production d’énergies renouvelables. Le solaire présente des rendements plus intéressants que l’éolien ou l’agrocarburant. Il apparait comme une piste prometteuse pour atteindre ces objectifs. Afin d’accélérer la capacité photovoltaïque installée, l’extension d’installation sur des terres agricoles semble nécessaire. Apparait alors le terme d’Agrivoltaïsme, qui désigne des installations en complète synergie avec l’activité agricole, apportant un service agronomique direct, sans diminution des revenus agricoles (source ADEME).

Agrivoltaïsme : différents acteurs

Un projet agrivoltaïque implique au départ :

  • une surface agricole : appartenant à un propriétaire foncier, agriculteur ou non,
  • un développeur : entreprise chargée du montage du projet agrivoltaïque de A à Z,
  • un agriculteur : ici nous parlerons d’éleveurs ovins. Il s’agit, ou non, du propriétaire foncier.

Le plus souvent, c’est le développeur qui supporte la charge d’installation des panneaux et qui exploite l’énergie produite. Les 3 acteurs sont liés entre eux par différents contrats. Le propriétaire des terres et l’éleveur reçoivent en général, chacun une rémunération. Les montants ne sont actuellement pas encadrés en PACA. Dans d’autres départements de France, certains acteurs locaux demandent qu’un minimum de 1 000€/ha/an soit reversé à l’agriculteur qui travaille sur le parc.

Par la suite, d’autres acteurs sont sollicités. Il faut compter entre 4 et 5 ans entre le début d’un projet et sa « sortie de terre ».

Agrivoltaïsme & éleveurs ovins

Les éleveurs ovins sont une cible préférentielle pour les développeurs. En effet, les technologies actuellement développées se prêtent bien à l’association avec du pâturage ovin.

Un bon nombre d’entre vous ont dû être sollicités par des entreprises, proposant d’installer des panneaux sur vos surfaces ou, proposant de nouvelles surfaces en panneaux à pâturer. Il est important de se RENSEIGNER et de ne pas s’arrêter à l’aubaine financière qui peut être présentée ! En effet, les surfaces agricoles avec panneaux doivent avant tout servir à une production agricole. Pour ce faire, des matériels et installations peuvent être financés par le développeur, pour assurer la pérennité de l’activité agricole.

A titre d’exemple, en PACA, une bergerie a été financée par un développeur. Elle n’appartient pas à l’éleveur mais le contrat de mise à disposition a été établi sur 30 ans, ce qui correspond à la durée de vie de l’installation agrivoltaïque. Dans la Nièvre, c’est le financement d’une bétaillère qui a été demandée, ainsi qu’un parc de contention. Cela vient en plus de la rémunération de l’éleveur.

Des brebis sous panneaux : un avenir à souhaiter ?

Il est certain que la plantation d’arbres répondrait aussi bien que des panneaux à la plupart des arguments présentés par les développeurs en faveur de leurs installations sur prairies et parcours (ombrage, diversification de la flore, …). Cependant les financements qui accompagnent ces projets présentent des intérêts économiques indéniables, qu’il est difficile de contre-argumenter. A la Chambre d’agriculture du Vaucluse, nous sommes de plus en plus sollicités pour des renseignements concernant ce type de projets. Par ailleurs, plusieurs demandes de permis de construire ont également été déposées. Avec ou sans l’accompagnement des organisations agricoles, des projets vont voir le jour.

La question de la pousse de l’herbe sous panneaux est tout à fait légitime. Actuellement, nous n’avons pas de références régionales sur le sujet. Le service rendu par l’ombrage des panneaux peut présenter des intérêts dans notre région. Nous n’avons cependant pas le recul pour correctement les identifier et en définir les limites. Il parait pertinent de suivre de près ces projets, pour mieux en comprendre les impacts d’un point de vue agronomique.

 

Auteur : Claire GUYON – Conseillère ovine à la Chambre d’agriculture de Vaucluse avec la relecture : Emmanuelle FILLERON – Responsable équipe Climat & Environnement

Coordinateur des chroniques ovines : Rémi Leconte – MRE